Contexte et objectif
Berceau historique de nombreuses civilisations, la Méditerranée est une région d'intérêt géostratégique majeur dont les enjeux environnementaux, politiques et sociétaux sont considérables. Or, c’est une région très vulnérable dont l’habitabilité future pourrait être compromise. L’une des principales sources d’inquiétude porte sur la dégradation de la qualité de l’air et sur d’éventuelles rétroactions positives de cette pollution sur le climat régional et réciproquement.
Faits peu connus en effet, l’air est souvent plus pollué au beau milieu de la Méditerranée que dans les faubourgs des grandes villes d’Europe, particulièrement en été, saison au cours de laquelle se développent traditionnellement les pics de pollution gazeuse et particulaire. Et si cette pollution est due pour partie à l’activité des quelques 470 millions de riverains, elle est surtout un produit d’import. La raison en est simple. Située à la confluence de plusieurs déversoirs naturels qui drainent l’air des continents limitrophes (Europe au nord et Afrique au sud), la Méditerranée est le réceptacle de toutes les pollutions. Ces pollutions qui convergent ainsi au-dessus du bassin, en particulier du bassin occidental cerné de toute part par de hauts reliefs, peuvent être :
- des pollutions dues aux émissions d’origine humaine venant du nord et se déversant dans le bassin via les grandes vallées fluviales (Rhône, Pô) ;
- des pollutions naturelles venant du Sahara sous la forme de gigantesques panaches de poussières désertiques ;
- des pollutions venant du pourtour du bassin et dues aux feux de forêts ou encore aux écosystèmes végétaux qui émettent des composés organiques sous l’effet des stress thermique et hydrique.
En outre, sous l’effet du climat méditerranéen, chaud, ensoleillé et sec, cette pollution va acquérir une nocivité accrue du fait de la formation d’ozone et de poussières ultrafines (notamment des aérosols organiques dits AOS pour aérosols organiques secondaires) susceptibles de causer des troubles respiratoires et cardiovasculaires mais aussi de modifier le climat en provoquant davantage de sécheresse : le début d’un cercle vicieux.
Le programme ChArMEx, qui faisait partie du méta-programme MISTRALS (Mediterranean integrated studies at regional and local scales), avait pour objectif de mieux caractériser la pollution atmosphérique du bassin méditerranéen et de son pourtour pour en identifier les sources, les facteurs aggravants et les conséquences sur l’environnement à proche et long terme. À cette fin, les moyens de mesure des observatoires déjà en place en Méditerranée ont été renforcés, tandis que de nouveaux observatoires ont été créés, en particulier dans le bassin occidental où il n’y en avait pas, afin de suivre sur le long terme l’évolution de la composition atmosphérique. En parallèle, des campagnes de mesures intensives sont organisées durant l’été (saison des pics de pollution). La campagne 2013 a fait ainsi suite à une pré-campagne qui s’est déroulée en 2012 et a été suivie en 2014 de plusieurs petites campagnes.
C’était la première fois que scientifiques, pouvoirs publics et industriels s’entendent sur un protocole règlementaire pour protéger l’environnement.